Malaise à l'ONF sur les méthodes de coupes

Un rapport commandé par l'ONF en 2012 montre un malaise sur les méthodes de coupes.

En voici les extraits pertinents.


OFFICE NATIONAL DES FORETS - CAPITAL SANTE - 22 mai 2012

Extraits pertinents

SYNTHESE DE L’AUDIT-DIAGNOSTIC
SOCIO-ORGANISATIONNEL REALISE DE
JANVIER A AVRIL 2012

2.2 Principales causes du malaise social ressenti par les personnels ressorties au cours de
l’audit

Le malaise social actuel puise sa source des principales problématiques suivantes :
• Une évolution de l’ONF perçue comme principalement dictée par les réductions d’effectifs
• Des réductions d’effectifs qui s’accompagnent d’une augmentation importante de la charge de travail
• Une évolution de l’ONF perçue comme induisant l’abandon progressif et « silencieux » de certaines
missions de service public
• Une large majorité du corps social aujourd’hui en opposition marquée avec la politique de coupe de bois et son impact présumé sur le patrimoine forestier
• Une opposition qui a pour conséquence un tiraillement éthique pour plusieurs catégories de personnels
• Des populations ouvrières dans une position difficile

Une large majorité du corps social en opposition marquée avec la politique de coupe de bois 

La politique de coupe de bois apparaît comme fortement contestée par la plupart des collaborateurs ONF rencontrées sur le terrain et en agence. Le sentiment que la logique de vente de bois à court terme – dictée par la nécessité d’atteindre des objectifs économiques - s’impose aujourd’hui face à celle de gestion durable de la forêt (qui, elle, se conçoit nécessairement à moyen ou long terme) est fortement répandu. Il s’appuie sur de nombreux exemples donnant l’impression que les activités économiques ont pris le pas, dans les discours et dans les actes, sur les activités non rentables on non facturables ; Le fait que des décisions de coupes de bois puissent « prendre des libertés » par rapport à un plan d’aménagement défini pour les 15 années à venir constitue un exemple emblématique de décision prise, selon les collaborateurs, au seul critère de la dimension économique. Certaines décisions jugées non respectueuses des normes sylvicoles (comme les règles de peuplement) sont également perçues comme étant dictées par les mêmes impératifs. Le discours managérial semble également renforcer le sentiment que les prestations facturables sont systématiquement à privilégier dans l’activité des agents patrimoniaux. La logique commerciale s’impose dans l’activité courante quand un directeur d’agence demande à un agent patrimonial de ne pas verbaliser un exploitant pour maintenir de bonnes relations avec ce dernier. Certaines prestations aux communes sont désormais facturées (comme par exemple les sorties de classe en nature). Et de fait, les objectifs de vente de bois ont induit une augmentation de l’activité de martelage et des autres activités bois. 

Le sentiment que le patrimoine forestier est menacé 

Ce sentiment est là aussi largement partagé au sein des agences et omniprésent chez les agents patrimoniaux et les ouvriers forestiers. Le sentiment que l’ «on coupe trop » revient dans de nombreuses bouches et traduit l’impression que le capital forestier serait en train d’être dilapidé. D’après les réponses au questionnaire de l’ASO, 60% des collaborateurs estiment que «l’ONF ne porte pas une attention suffisante à la gestion durable du patrimoine forestier ». Cette situation, en partie alimentée par la politique de coupe de bois, s’ancre également dans les évolutions récentes aux répercussions très concrètes : par manque de temps, les agents patrimoniaux ne peuvent plus contrôler les coupes des exploitants (« à quoi bon marteler si on ne peut pas contrôler les coupes après ? »). Le non-remplacement des agents patrimoniaux sur certains triages et l’augmentation de la taille de ces derniers induisent également une perte de connaissance du terrain et de finesse dans la gestion de la forêt. Il semble également que la vision globale de la forêt – nécessaire à la prise des décisions adéquates sur le triage qui ne peut être abordé que comme un » système » complexe - soit en train de disparaître au niveau de l’agence, en partie du fait du fonctionnement très cloisonné des différents services (voir plus loin). D’autres faits sont également relevés et traduisent le malaise ressenti : une mission de biodiversité affichée mais dont les normes sont difficiles à faire appliquer sur le terrain ; des agents patrimoniaux qui estiment que plus personne ne s’inquiète de ce qui est fait sur le terrain (« seuls les chiffres de coupe sont contrôlés ») auxquels s’ajoutent des altercations et une agressivité croissante dans les relations avec le public, choqué par des coupes ou des ventes de bois (au bord de la route) désormais plus visibles ; des influences politiques locales (un élu local qui intervient auprès de la direction de l’ONF pour faire stopper des coupes) ou la constitution de chaines humaines par des associations désireuses d’empêcher des travaux, sont des exemples marquants qui questionnent et affectent les personnels ONF. 

Le tiraillement éthique pour plusieurs catégories de collaborateurs 

L’ASO révèle que 59% des personnes interrogées – toutes catégories confondues - déclarent vivre un désaccord entre leurs valeurs et celles de l’Office. Ce conflit de valeur est vivement ressenti par les personnels de terrain (agents patrimoniaux en tête). Il a pour conséquence chez nombre d’entre eux une forme de nécessité morale de «devoir protéger la forêt contre l’ONF ». Cette prise de position assumée induit une souffrance éthique et se traduit par des comportements de résistance à l’encontre de l’organisation et des décisions jugées contraires à l’intérêt de la forêt. Le sentiment d’une perte progressive des valeurs forestières est fortement exprimé, alors que ces mêmes valeurs revêtent à l’ONF une dimension identitaire extrêmement forte car au coeur des missions et des métiers. Enfin, 58% des personnes déclarent « un écart entre la qualité du travail qu’ils font et celle qu’ils aimeraient faire », cette qualité empêchée représentant pour de nombreux métiers une réalité difficile à vivre. 

CONFÉRENCE du 27 septembre 2014 : Le problème de la gestion forestière en France


CONFÉRENCE

Le problème de la gestion forestière en France
L’exemple de la forêt de Fontainebleau
Samedi 27 septembre 2014 à 20h30
Mille Clubs - Impasse des Pincevents
77000 La Rochette

Conférenciers :
Olivier Tournafond et Guillaume Bricker

Entrée libre