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Commission supérieure des sites : avis du 15 mars 1957

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Résumé
- Autoroute sud de Paris (avis défavorable)

Conseil national de la protection de la nature : avis du 14 mars 1957

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Résumé
Avis défavorable au tracé de l'autoroute du sud

Académie des sciences : Voeu du 4 décembre 1957

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Résumé
- Avis défavorable au tracé de l'Autoroute du Sud

Académie des sciences : Voeu du 25 février 1957

- Voeu

Résumé
- Avis défavorable au tracé de l'Autoroute du Sud

Assemblée nationale - résolution sur le massif forestier de Fontainebleau du 14 février 1957

UTILISATION DE LA FORET DE FONTAINEBLEAU A DES FINS MILITAIRES 

Discussion d'une proposition de résolution. 

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la " proposition de résolution de M. Casanova et plusieurs de ses collègues tendant à inviter le Gouvernement à refuser le massif des Trois Pignons en forêt de Fontainebleau aux autorités militaires, et à conserver intégralement la forêt de Fontainebleau au patrimoine touristique et national (nos 827, 2942). La parole est à M. Deixonne, rapporteur de la commission de l'éducation nationale . 

M. Maurice Deixonne, rapporteur. Mesdames, messieurs, lorsque j'ai sollicité et obtenu le rapport sur la proposition de M. Casanova, je n'excluais pas l'hypothèse que nos collègues communistes nourrissaient quelque maligne pensée à l'encontre des troupes de l'O. T. A. N. et spécialement de nos alliés américains. Il va sans dire que, si cette pensée était la leur, elle a complètement disparu des travaux de la commission au nom de laquelle je vous apporte 'aujourd'hui des conclusions unanimes. Notre accord était même tellement profond que nous avions espéré que notre proposition de résolution pouriait être adoptée sans débat par l'Assemblée nationale. Mais M. le secrétaire d'Etat au budget a cru devoir y faire opposition pour des raisons que nous aurons l'occasion d'examiner au cours du débat. Le premier point du texte que nous vous demandons d'adopter pose le principe de la reconstruction de notre école militaire. Cela devient, en effet, un scandale que, dix ans après la Libération, notre école militaire soit encore reléguée à Coëtquidan dans des conditions telles que l'on rougit de la présenter à des visiteurs étrangers. Les élèves sont fréquemment obligés de défendre leurs baraquements contre l'envahissement des eaux, ce qui ne saurait évidemment remplacer la piscine qui leur fait cruellement défaut. Leurs instructeurs sont eux-mêmes si mal logés qu'une fonction qui devrait être honorifique devient pour eux une pénalisation. Enfin, si la proximité des landes bretonnes favorise les exercices de manoeuvre, l'école est privée de ce milieu intellectuel qu'exige la formation de futurs grands chefs militaires et qui aoit éveiller, puis confirmer, les vocations. Si nous ne voulons pas que l'armée française connaisse bientôt une crise redoutab.e dans son haut commandement, il faut, après les terribles pertes enregistrées en Indochine, iéunir d'urgence les conditions qui assureront à notre futur institut militaire un recrutement et un enseignement dont la valeur défiera la critique. Permettez-moi de vous rappeler le cri d'alarme lancé par JH. de Chevigné devant l'Assemblée nationale le 19 mars 1954. « Les armes principales — disait-il — infanterie, artillerie, cavalerie, génie, comptaient, en 1914, 52 p. 100 d'officiers sortant des grandes écoles. Elles ne comptent plus que 21 p. 100 de Saint-Cyriens, 1 p. 100 de polytechniciens, ce pourcentage étant tomtïé à 8 p. 100 dans le "grade de lieutenant. Plus de polytechniciens depuis 1939 et moins de 10 p. 100 de Saint-Cyrien's parmi nos lieutenants. » Certes, il n'appartient pas à votre commission de l'éducation nationale de proposer un statut qui pourrait être celui du futur Saint-Cyr, mais elle ne croit pas sortir de son rôle en insistant sur la nécessité de ne pas marchander aux officiers de demain l'initiation sociale, la formation morale et la vaste culture que commandent à la fois les formes modernes de la guerre et les problèmes de la paix. Nous voulons, notamment, espérer que les deux milliards de francs votés par l'Assemblée nationale au titre d'autorisation de programme pour la reconstruction de Saint-Cyr et qui ont été sérieusement menacés lors des récents blocages de crédits, ne seront pas remis en cause par la suite. N'oublions pas que ces deux milliards ne représentent qu'un modeste départ par rapport aux dix milliards de francs qui seront nécessaires pour la reconstruction de l'école, reconstruction qui ne pourra s'opérer que dans un délai minimum de trois ans. Puisque les négociations se poursuivent entre les ministres dépensiers et M. le secrétaire d'Etat au budget au sujet de la revision du blocage des crédits d'abord et des économies à réaliser par la suite, nous sommes heureux que l'occasion nous soit offerte de déclarer bien haut que Saint-Cyr ne doit pas plus longtemps être sacrifié aux considérations qui ont jusqu'à présent retardé sa renaissance. Mais un autre problème est de savoir où Saint-Cyr doit être reconstruit. Nous avons enregistré avec joie l'engagement de M. Max Lejeune, secrétaire d'Etat aux forces armées, de reconstruire l'école à Saint-Cyr, c'est-à-dire dans le cadre même où notre école militaire retrouvera ses plus belles traditions. Mais si cette décision nous satisfait pleinement, elle ne peut pas nous faire oublier que d'autres projets ont jadis vu le jour. M. Filippi, ou du moins ses services feignent d'ignorer que M. Jacques Chevallier avait jadis conçu le dessein d'implanter la nouvelle école dans la forêt de Fontainebleau. C'est pourtant un fait de notoriété publique, et vous me dispenserez, j'imagine, de présenter ici le dossier qui pourrait prouver d'une façon péremptoire qua ce projet n'est pas un mythe. C'est à ce sujet que nous vous demandons de prendre clairement, position, car nous estimons qu'il y a dés morts qu'il est prudent de tuer deux fois. Nous ne contesterons pas, d'ailleurs, l'intérêt que présentait cette idée. D'une part, la proximité de Paris eût permis aux élèves le contact des maîtres les plus qualifiés. D'autre part, la noblesse du site, avec de forts beaux débouchés possibles à travers bois sur la boucle de la Seîne, laissait imaginer un ensemble pouvant rappeler l'admirable panorama de Wèst Point. Mais nous ne pouvons dissimuler la contrepartie. La butte de Montceau, à Avon, sur laquelle il était question d'édifier l'école, offre une plate-forme ellipsoïdale de 100 mètres sur 200. Nous sommes loin des 50 hectares qui, selon l'Etat-major de l'armée, sont nécessaires pour loger l'école proprement dite, la troupe, les services, les cadres, et des 150 hectares qui seraient indispensables si on y ajoute le terrain de manoeuvre adjacent. Construire sur les contreforts ? Ce serait sans doute possible, mais au prix de quelles dépenses! Et surtout quel bouleversement dans toute line nouvelle partie de la forêt de Fontainebleau ! L'armée détient déjà les 750 hectares du domaine du Bois- Rond, achetés pour les manoeuvres de la première, région, et dont les rochers sont d'ailleurs peu propices à l'évolution des tanks. Dans la perspective d'une implantation de l'école militaire à Avon, elle se proposait de compléter son domaine en acquérant la plaine de Chanfroy et les terrains adjacents, soit 273 hectares sur la commune d'Arbonne et 171 hectares sur la commune de Noisysur-Ecole. Il est juste d'ajouter que l'armée se déclarait prête à renoncer aux 106 hectares du polygone d'artillerie et aux 18 hectares du Montmorillon. Mais on voit à quel point la forêt eût été écornée, et c'est là la source d'oppositions insurmontables que votre commission a le devoir de vous signaler. Elles n'émanent pas seulement des deux cents propriétaires entre lesquels se répartissent les 210 hectares de Chanfroy. Elles viennent aussi de la préfecture de la Seine, peu satisfaite de voir un nouveau tronçon de l'aqueduc de la Vanne passer en terrain militaire. Mais ce sont surtout tous les amis de la nature qui protestent à jusfe titre. Trésor inestimable, miraculeusement échappé à l'emprise des villes tentaculaires, paradis des campeurs, des randonneurs, des estivants, des alpinistes, des mycologues, des peintres, de tous les citadins affamés d'air pur, avides de détente, épris de beauté, la forêt de Fontainebleau devrait être érigée depuis longtemps en parc national. 

Mme Ractiel Lempereur, présidente de la commission. Très bien ! 

M. le rapporteur. Ce ne sont pas seulement les amis de la forêt qui nous y convient, mais l'étranger lui-même nousrotection de la nature publie un manifeste qui déclare notamment : « La forêt de Fontainebleau, carrefour biogéograpliique, sanctuaire de richesses scientifiques de haute valeur, refuge de nombreuses espèces animales et végétales, constitue actuellement, comme elle l'a été depuis le moyen âge, depuis Tournefort et Linné, l'un des plus riches domaines qu'offre aux . hommes de science la nature dans le monde. « Trouer la continuité du grand massif, livrer aux manoeuvres motorisées une partie de ce domaine, y apporter des éléments de perturbation et y pratiquer des coupes qui rompront l'intégrité de ce magnifique parc national et en assureront l'appauvrissement, serait une décision que réprouveraient dans 'e monde entier tous ceux qui sont attachés à la défense des richesses naturelles ». Il faut donc avoir, comme le demande M. André Billy « pilié pour la forêt de Fontainebleau ». 11 faut exclure radicalement l'idée d'y installer notre nouvelle école militaire, même en lui accordant, de l'autre côté de la Seine, les bois de Valence ou de Champagne. Mais il ne suffit pas d'exclure cette idée; nous ajoutons qu'il est nécessaire de reconstituer le domaine de Fontainebleau. Au cours de la visite que nous y avons faite avant de déposer notre rapport, nous avons pu" voir les militaires français, les militaires américains, les civils s'acharner à qui mieux mieux à la destruction de la forêt. Partout des chantiers, des arbres abattus. Nous demandons qu'un ceup de frein énergique intervienne avant que cette frénésie n'arrive à son terme. Puisque l'armée était prête à renoncer au polygone et au Montmorillon, noue en réclamons formellement la rétrocession à l'administration des eaux et forêts pour laquelle ces sites présentent justement le plus grand intérêt. Après quoi, il y aura lieu d'examiner jusqu'à quel point le Bois-Rond est effectivement utilisé par la première région. A notre avis, il n'existe pas, dans la garnison de Fontainebleau, de troupes susceptibles d'utiliser véritablement le terrain. Pour les manoeuvres de l'école militaire, l'armce dispose déjà des 250 hectares de Frileuse ; pourquoi n'essayerait-elle pas d'agrandir ce domaine en échangeant Bois-Rond et les différentes parcelles dont elle est encore détentrice ici et là ? Quant aux manoeuvres de plus grande envergure, aux manoeuvres de printemps, ce n'est évidemment ni à Bois-Rond, ni à Frileuse qu'elles pourront avoir lieu, mais dans des terrains propices comme Mourmelon. Coëlquidan, Mailly, voire l'Afrique du Nord. Mais je répète que le maintien de Bois-Rond à l'autorité militaire ne se concevait que dans l'hypothèse où l'école militaire serait implantée à Fontainebleau. Cette hypothèse écartée. il convient de rendre la forêt à sa véritable vocation. Le dernier problème qui a retenu notre attention est celui des indemnités auxquelles a donné lieu la construction du pipe-line Donges-Melun-Metz. C'est, en effet, une autre catastrophe qui est venue fondre sur la région en raison de la construction de ce pipe-line destiné à acheminer les produits pétroliers de l'Atlantique à l'Allemagne occupée. Dire le massacre de certains paysages par ces citernes gigantesques, ces tranchées et ces coupes est vraiment impossible. Un seui mot peut traduire la stupeur indignée des touristes : vandalisme. Nous n'en dirons pas plus puisque, cette fois, le mal est fait et qu'il est irréversible. Du moins est-il infiniment souhaitable que soient revisées les indemnités souvent fantaisistes auxquelles a donné lieu l'expropriation des terrains. Je sais bien que c'est sur ce point que le département du budget soulève quelques objections et je ne discuterai pas avec les services de M. Filippi la question de savoir si le pipe-line Donges-Metz passe dans la forêt de Fontainebleau ou seulement à ses abords. A notre avis, la question est seulement de savoir: d'abord si des injustices ont été commises, ensuite's'il est encore temps de les réparer. Or les renseignements que nous avons recueillis et qui émanent, notamment, de secrétaires de mairie, c'est-à-dire de personnes au moins aussi qualifiées pour se prononcer que les inspecteurs des finances, nous permettent d'affirmer que l'injustice est partout. J'ai cité dans mon raipport écrit un certain nombre de ces témoignages. On nous dit par exemple qu'on a qualifié ne friches des jachères laissées intentionnellement par les cultivateurs à cause de l'approche des travaux. Comprenez bien que des gens qui sont menacés d'expropriation ne vont pas prendre la peine de cultiver leurs parcelles. Mais on qualifie ensuite celles-ci de jachères. Dans certains cas où des bois ont été abattus on a confondu des taillis et des hautes futaies. Les écarts de prix pour des  parcelles de même qualité sont énormes: ces prix varient par exemple de 125.000 à 433.769 francs l'hectare pour des terres de quatrième classe. Nous sommes loin de l'affirmation de M. Filippi, suivant laquelle le prix uniforme de 110.000 francs i l'hectare a été appliqué. On ajoute que les experts de la commission arbitrale ont rejeté les demandes d'indemnités spéciales pour l'exploitation de la terre de bruyère et des carrières à grès, fl existe des plantations fort onéreuses dans cette région où beaucoup d'exploitations approvisionnent la régies parisienne en primeurs. Or des rapports nous apprennent que le pied d'asperge, en pleine production, a été évalué à deux francs et les pommiers, en plein rapport, à 4.500 francs. Il ne faut pourtant pas beaucoup de pommes pour atteindre le total de 4.500 francs. L'indemnité pour perte de loyer n'a pas été retenue en faveur du propriétaire bailleur. La question des impôts fonciers pour les terrains expropriés dont ies propriétaires ont perdu la jouissance depuis 1953 n'a pas été résolue. Aucune mesure de rétribution n'a été prise en faveur des personnes uniquement usufruitières des parcelles expropriées. Les sociétés de chasse ont été gravement lésées, etc. Si nous ajoutons que de nombreux vices de forme ont été constatés dans la procédure administrative en raison de la liâte avec laquelle on a dû procéder à ces expropriations, no-us sommes en droit de conclure que le problème est à reprendre de toute nécessité dans son ensemble, surtout depuis que l'Assemblée. nationale a manifesté, en votant le 7 octobre 1955 la proposition ds notre collègue, M. Charpentier, sa volonté de ne plrr» voir les agriculteurs spoliés au hasard des expropriations à titre militaire. Dernière question: est-il encore temps de revenir sur ce désordre ? Certes oui, puisque la lettre de M. Filippi reconnaît que la procédure d'expropriation est encore en cours d'exécution. Au surplus, le texte prudent que ie vais avoir l'honneur de TOUS proposer et qui est dû à la rédaction de M. André Marie, ne devrait pas soulever de véritable opposition de la part de l'administration des finances. Voici ce texte.: « L'Assemblée nationale invite le Gouvernement: « 1* A proposer au Parlement le vote des erédits nécessaires i la reconstruction de l'Eeole spéciale militaire ; « 2" A ne pas reconstruire cette Ecole dans la forêt de Fontainebleau, qu'il convient de défendre activement contre les empiétements de tontes sortes qui ne cessent de porter atteinte à, notre patrimoine touristique; « 3» A rendre à l'administration des eaux et forêts tous les sites, tels que le polygone d'artillerie, le M ont morillon, qui ne sont pas absolument indispensables aux autorités militaires ; « 4" A rechercher l'indemnisation équitable de tous les riverains du pipe-line Donges-Melun-Metz. » Tel est le texte, à notre sens modéré, que vous propose la commission de l'éducation nationale. J'espère qu'au moins tous les amis de la forêt de Fontainebleau auront à coeur de l'adopter. (Applaudissements à gauche et au centre.) 

M. le président. Le Gouvernement oppose-t-il à l'adoption de tout ou partie du rapport, une irrecevabilité constitutionnelle, légale ou réglementaire ? 

M. Albert Gazier, ministre des affaires sociales. Il s'agit d'une proposition de résolution. 

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. André Gautier. 

M. André Cautier. Mesdames, messieurs, M. Deixonne a éprouvé le besoin, en commençant son rapport de parler de « l'intention maligne » des communistes lors du dépôt de leur texte. La proposition de résolution déposée par M. Casanova et moi et les membres du groupe communiste est ainsi conçue: « L'Assemblée nationale invite le Gouvernement à respecter le patrimoine touristique et national de la forêt de Fontainebleau. » Il reste donc, dans le fond, que s'il y a un esprit malin, c'est bien M. Deixonne qui en est animé. 

M. Rax Brusset. A malin, malin et demi. 

M. André Gautier. Je veux rappeler les mobiles qui avaient incité le groupe communiste à deposer la proposition de résolution oui est à l'origine du rapport de M. Deixonne. Nous "voulions inviter le Gouvernement à refuser de nouveaux empiétements des autorités militaires en forêt de Fontainebleau et nous l'invitons à conserver intégralement cette magnifique forêt au patrimoine touristique et national. Les raisons de notre proposition de résolution étaient les suivantes: Le 3 juin 1952, M. le maire de la commune de Noisv-sar- Ecole recevait une lettre datée du 29 mai 1952, émanant de la première région militaire et signée : le chef de bataillon : Guillerey. Cette lettre indiquait brièvement que le secrétaire d'Etat à la guerre avait décidé l'achat du domaine « Bois-Rond », faisant partie du massif des « Trois Pignons ». Ce terrain serait destiné à être utilisé comme terrain de manoeuvre par les unités stationnées dans la première région militaire. De nombreuses protestations se sont élevées contre cette nouvelle menace, tendant à amputer une fois de plus la magnifîque forêt de Fontainebleau, déjà enlaidie et mutilée par le champ de tir, par la construction de logements destinés aux troupes américaines à la Fourche et Avon, et par l'installation des dépôts de matériel de l'armée américaine. On comprend l'émotion justifiée qui s'est emparée de la population de Seine-et-Marne, des touristes, des randonneurs, des peintres, des chercheurs et des estivants. La forêt de Fontainebleau, toute proche de la capitale, fait partie du vaste ensemble parisien. Chaaue dimanche, des milliers de touristes y affinent, et à la belle saison la forêt est devenue le lieu de prédilection de milliers de campeurs qui trouvent près de la capitale des lieux de repos et de délassement. Le conseil municipal d'Arbonne, réuni le 25 octobre, a pris à l'unanimité une résolution dont voici quelques extraits: « Le conseil municipal, « Considérant que si ce projet se réalisait, ce serait amputer la commune du site touristique le plus merveilleux et qui a été reconnu tel puisqu'il a été classé avec le site des Trois-Pignons ; « ...cette région possède les plus belles plantations de pins d'Arbonne ; « ...c'est également dans ce territoire que se trouvent les deux charniers découverts en 1944, où 36 patriotes furent fusillés par les Allemands et la population locale et d'ailleurs va s'incliner souvent sur le lieu ou ces martyrs ont laissé leur vie pour la renaissance de la France libre... » Pour les motifs que je viens d'évoquer et bien d'autres, le conseil municipal d'Arbonne demandait à tous les parlementaires de se pencher sur cette affaire. Nous avons d'autres raisons encore de nous inquiéter. J'ai cité les charniers dans lesquels,, au lendemain de la libération, nous avons trouvé les cadavres de trente-six patriotes, de trente-six de nos frères de combat. Des monuments très simples ont été élevés sur ce haut lieu de la résistance. Mais celui qui fut le responsable direct de ces assassinats revient maintenant sur les lieux, à Fontainebleau même, et sans doute le général Speidel voudra-t-il faire disparaître les traces de ses crimes. Il serait odieux de le laisser faire. La nomination de Speidel constitue en elle-même un outrage intolérable et c'est une raison de plus pour nous d'obtenir du Gouvernement l'assurance que ces lieux resteront inviolés et que la forêt sera sauve'gardée. (Applaudissements à l'extrême gauche.) 

R. Rax Brusset. Vous feriez bien de demander qne le monument de Mandel, élevé également dans la forêt de Fontainebleau. soit lui aussi protégé. 

M. André Gautier. Et c'est à nous que vous venez dire cela! 

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales. 

M. le ministre des affaires sociales. J'éprouve quelque embarras à répondre à l'exposé si détaillé et si complet de M. le rapporteur car les conclusions auxquelles il a abouti n'ont, je l'avoue, que de lointains rapports avec le département des affaires sociales dont j'assume la charge et celui des affaires étrangères dont j'assure l'intérim. Mais je ne veux pas que les membres de la commission et nos collègues intéressés A ce débat se soient dérangés en vain. M. Deixonne sait aussi que je m'efforce de répoûdre à chacune de ses questions, en regrettant de ne pas y réussir toujours parfaitement. En ce qni concerne l'école de Saint-Cyr, à ma connaissance, aucune demande d'affectation de terrains situés dans la larêl de Fontainebleau n'a été adressée jusqu'à ce jour par 1« ministre de la défense nationale, de sorte que la commission centrale de contrôle des opérations immobilières n'a jamais été saisie du projet auquel notre collègue a fait allusion. D'autre part, d'après les renseignements qui m'ont été communiqués, les indemnisations pour les terres de quatrièm« classe ont bien été effectuées au tarif uniforme de 110.000 francs l'hectare, outre l'indemnité de réemploiSi des différences ont été constatées, comme celles que M- Deixonne a citées dans son rapport, c'est en raison de la présence d'arbres fruitiers sur certaines de ces terres. Il apparaît que cette indemnisation s'est effectuée dans des conditions parfaitement légales et normales. C'est pourquoi je ïie puis absolument ças prendre l'engagement que ces opérations seront reconsidérées. 

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. 

M. le rapporteur. Je ne chercherai pas querelle à M. le ministre parce que, dans ce débat pour lui improvisé, il est venu ici avec des documents émanant de la direction du budget, J'ai déjà répondu. Je pense que l'Assemblée est maintenant au courant des problèmes que pose la forêt de Fontainebleau. J'ai le ferme espoir que la proposition de résolution que nous présentons sera votée. Il va de soi qu'en ce cas, si le Gouvernement ne suivait pas les recommandations de l'Assemblée, chacun de nous aurait le droit, de l'.interpeller pour non exécution de ce qui serait le voeu de l'Assemblée nationale. 

M, le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...  La discussion générale est close.  Je consulte l'Assemblée sur le passage à la discussion de la proposition de résolution. (L'Assemblée, consultée, décide de passer à la discussion de la proposition de résolution.) 

M. le président. Je donne lecture de la proposition de résolution :  « L'Assemblée nationale invite le Gouvernement:  « 1° A proposer au Parlement le vote des crédits nécessaires à la reconstruction de l'école spéciale militaire;  « 2° A ne pas reconstruire cette école dans la forêt de Fontainebleau, qu'il convient de défendre activement contre les empiétements de toutes sortes qui ne cessent de porter atteinte à notre patrimoine touristique;  « 3° A rendre à l'administration des eaux et forêts tous les sites, tels le polygone-d'artillerie, le Montmorillon, qui ne sont pas absolument indispensables aux autorités militaires ;  « 4° A rechercher l'indemnisation équitable de tous les riverains du pipe-line Donges-Melun-Metz. » Personne ne demande la parole ?...  Je mets aux voix la proposition de résolution.  (La proposition de résolution, mise aux voix, est adoptée )